APERTAE
aperto, as, are : ouvrir en grand
apertae, découvert, nu, manifeste notoire, intelligible, clair,
ouvert, franc, effronté, sans gêne, libre accessible.
pertus : faire une percée
Pascal Maupeu, le musicien à la guitare entre sur le plateau, s’installe, peu de temps après lui c’est au tour de la danseuse Tal, qui vient des coulisses avec de grandes chaussures rouges, une chevelure rousse, de longs cils, très longs. Elle se place derrière le piano, alors le chant commence. Une reprise de Stein um Stein de Rammstein. Ainsi commence la pièce avec les paroles qui emmurent une personne. Une maison dans laquelle aucune lumière ne parvient, d’où aucun cri ne peut être entendu. Le monde extérieur est hors d’atteinte. La pièce s’ouvre sur une l’histoire d’une réclusion (ainsi le jardin n’est pas construit pour une promenade mais comme espace suffisamment grand pour que la voix s’y perde, pour qu’elle ne touche plus). La danseuse prend place sur les fondations de la scène, carré blanc sur plateau noir, de profil, elle relance un chant. Puis, un autre danseur, Dimitri fait son entrée, il traverse la scène, aller et retour, arrêt du mouvement afin que le regard saisisse le corps sa posture et sa représentation comme ce qu’il représente. Démarche dont nous reconnaissons le long apprentissage sur une piste de mode, un pas dressé pour provoquer la séduction, une image dans laquelle il serait possible de se projeter. C’est le pas d’une démarche assuré qui ne chute pas, posture qui au fur et à mesure se trouve pris dans une rapidité, une tension. Soudain, le corps se fige, bouche grande ouverte sans cris audible. Le danseur propose son propre corps. Joli mouvement, toujours plus beau il se soumet ainsi et ce volontairement au désir de l’autre qui ne semble plus répondre. Désir qui morcelle le corps, le retourne, déplace ses fonctions. Tout est sans dessus ni dessous et cela ira jusqu’au dépouillement, (les jambes deviennent bras, tronc au sol et jambe en l’air, ça brasse du vent et n’avance plus, jambe sans tête). Homme ou femme, déjà autre, à quatre pattes il va vers l’animal, ils sont déjà trois sur scène : seul ou en meute, à côté et dedans. Pendant ce temps, Tal sans perruque veste retirée, pousse les blocs blancs. Le sol se fragmente, et la lenteur n’empêche pas la distance de plus en plus grande. Quelque soit la ligne, le tracé, celui-ci n’est jamais définitif, toujours en proie à des forces qui viennent les faire bouger. La ligne comme frontière comme ce qui passe ou ne passe pas, appelle à un franchissement positif ou négatif, permit ou interdit. Si le costume est un masque, celui-ci se porte au devant de nos regards tronqués, signifiant par là que sous le masque se trouve un autre, des autres. S’exposer au regard : le détourner, le tromper mais aussi être pris par lui. Alors chacun conquiert une danse, qui amènera à un franchissement ou pas. Chacun dans une solitude et une énergie qui passe de corps en corps, remué par la terre et ébranlant la terre, c’est le sursaut qui se trouve partagé.
Entretiens APERTAE.mp3
Apertae, Bernardo Montet
APERTAE
aperto, as, are : ouvrir en grand
apertae, découvert, nu, manifeste notoire, intelligible, clair,
ouvert, franc, effronté, sans gêne, libre accessible.
pertus : faire une percée
Pascal Maupeu, le musicien à la guitare entre sur le plateau, s’installe, peu de temps après lui c’est au tour de la danseuse Tal, qui vient des coulisses avec de grandes chaussures rouges, une chevelure rousse, de longs cils, très longs. Elle se place derrière le piano, alors le chant commence. Une reprise de Stein um Stein de Rammstein. Ainsi commence la pièce avec les paroles qui emmurent une personne. Une maison dans laquelle aucune lumière ne parvient, d’où aucun cri ne peut être entendu. Le monde extérieur est hors d’atteinte. La pièce s’ouvre sur une l’histoire d’une réclusion (ainsi le jardin n’est pas construit pour une promenade mais comme espace suffisamment grand pour que la voix s’y perde, pour qu’elle ne touche plus). La danseuse prend place sur les fondations de la scène, carré blanc sur plateau noir, de profil, elle relance un chant. Puis, un autre danseur, Dimitri fait son entrée, il traverse la scène, aller et retour, arrêt du mouvement afin que le regard saisisse le corps sa posture et sa représentation comme ce qu’il représente. Démarche dont nous reconnaissons le long apprentissage sur une piste de mode, un pas dressé pour provoquer la séduction, une image dans laquelle il serait possible de se projeter. C’est le pas d’une démarche assuré qui ne chute pas, posture qui au fur et à mesure se trouve pris dans une rapidité, une tension. Soudain, le corps se fige, bouche grande ouverte sans cris audible. Le danseur propose son propre corps. Joli mouvement, toujours plus beau il se soumet ainsi et ce volontairement au désir de l’autre qui ne semble plus répondre. Désir qui morcelle le corps, le retourne, déplace ses fonctions. Tout est sans dessus ni dessous et cela ira jusqu’au dépouillement, (les jambes deviennent bras, tronc au sol et jambe en l’air, ça brasse du vent et n’avance plus, jambe sans tête). Homme ou femme, déjà autre, à quatre pattes il va vers l’animal, ils sont déjà trois sur scène : seul ou en meute, à côté et dedans. Pendant ce temps, Tal sans perruque veste retirée, pousse les blocs blancs. Le sol se fragmente, et la lenteur n’empêche pas la distance de plus en plus grande. Quelque soit la ligne, le tracé, celui-ci n’est jamais définitif, toujours en proie à des forces qui viennent les faire bouger. La ligne comme frontière comme ce qui passe ou ne passe pas, appelle à un franchissement positif ou négatif, permit ou interdit. Si le costume est un masque, celui-ci se porte au devant de nos regards tronqués, signifiant par là que sous le masque se trouve un autre, des autres. S’exposer au regard : le détourner, le tromper mais aussi être pris par lui. Alors chacun conquiert une danse, qui amènera à un franchissement ou pas. Chacun dans une solitude et une énergie qui passe de corps en corps, remué par la terre et ébranlant la terre, c’est le sursaut qui se trouve partagé.
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