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Léthé du philosophe

A Jean-Christophe

Je veux m’oublier pour retrouver ce qui me dépasse. Je veux perdre tout souvenir de ma vie antérieure et ne garder que le souvenir de l’impossible, de ce que je n’ai jamais vu et qui est encore à voir : mon seul souvenir sera le souvenir de l’invu.

Je veux un corps enfin. Un corps plongé dans la lumière du matin, de ce matin qui vient et qui est le début d’un nouveau monde. C’est dans nos corps que tout ça viendra. Il faut seulement se laisser aller, se plonger dans les eaux du Léthé, dans les yeux de Léthé, pour oublier tout – même l’oubli – et avoir ainsi accès à nos destins, enfin dévoilés, enfin réels : alètheia.

Sans prévisions, sans images déjà données, sans rien d’autre que nos yeux ouverts et envahis par la lumière.

Hors de cette nuit sans fin, de cette époque nécrophile, de ce temps sans persistance.

Oublier tout ça, oublier toute tiède sagesse pour rêver encore, rêver plus vrai, le rêve d’une chose, mais d’une chose qui n’a pas d’images ni de spectres, parce qu’elle est encore et à jamais à imaginer.

Rêver ce qui persiste d’une génération à l’autre, d’une vie à l’autre, d’un matin à l’autre.

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Silence of the night.

Dark window.

Eyes wide open.

Fear that there is no longer anything (to see).

The black blends into white

and from the white – white on white –

new figures.

Fear is conquered.

After every night, a new dawn of the senses.

Morning of the sense.

 

Federico Ferrari

En juillet, la vie manifeste s’associe au blog Strass de la philosophie de Jean-Clet Martin pour faire résonner une initiative ouverte l’an dernier : L’été des philosophes.