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Imprécations. Exercice IV

Car je ne peux ignorer le mal qui se propage sur le muscle de la langue. Je ne peux ignorer la langue mauvaise et viciée. Car je ne peux ignorer ma maladie. Car langue malade et mains mauvaises commettent ensemble. Car l’une l’autre se courbe à l’une l’autre, ne se sépare pas. Car je ne peux ignorer que j’y mets tout le mal de moi. Car je ne vis pas sans ignorer ce qui de moi est mal. Car je ne peux ignorer que je transforme le plomb en mot. Car je n’ignore pas qu’on se prend dans les mots que j’assemble. Car je n’ignore pas que le mal souhaite y voir le mal et je n’ignore pas sa méprise. Car je n’ignore pas que le mal tient au plomb de ma langue. Car tout le mal qui se propage est le mal que l’on me fait. Car le mal que l’on me fait se trouve à même la langue dès lors nommé dans la langue mauvaise et viciée. Car le mal que l’on me fait entre dans les mots pour y joindre un mal qui n’est pas mon mal. Car le mal est fait pour cela est fait pour diriger les mots et ma maladie. Car je n’ignore pas que ma langue mauvaise et viciée est bonne pour le mal. Car le mal manque à lui même et a besoin de ma maladie pour se faire un corps et régner. Car je n’ignore pas le mal que l’on me fait pour user de ma maladie en use parce que le mal sait qu’elle est bonne pour lui. Car je ne vis pas dans l’ignorance que le mal sait ce qui est bon pour lui. Car je ne vis pas dans l’ignorance du mal qui par moi cherche à s’accomplir. Car le mal est fait pour cela est fait pour s’accomplir dans les langues des autres. Car je n’ignore pas que le mal est en manque de sa propre langue car le mal s’ignore. Le mal est en manque de sa propre langue c’est pourquoi ma langue malade est bonne pour lui. Car ma langue malade ne vient pas de lui mais de ma maladie. Le mal manque à lui-même car il n’est pas malade, il est bon. Il est bon et bien car le mal s’ignore et pense qu’il est bon et bien. Car le mal est juste puisqu’il est bon et bien car il vit dans l’ignorance de son propre mal. Car le mal sait qu’il est juste parce qu’il s’ignore. Car est juste qui sait faire une histoire pour faire le mal et prendre les corps. Car l’histoire est faite par le mal pour faire justice en forçant les corps. Car pour que le mal fasse justice il lui faut une histoire qui emprisonne les corps. Car le mal propage une histoire pour que le mal puisse régner. Car les histoires du mal deviennent les vérités qui font justice au mal. Car le mal a besoin de justice pour continuer l’ignorance de l’accomplissement du mal. Car l’ignorance lui permet d’user de ma langue et de ma maladie pour exister. Car sans ma langue malade et ma maladie le mal n’aurait pas de force pour s’accomplir. Car je porte ma maladie et mes mains mauvaise dans ma langue viciée. Car ma langue est mauvaise et viciée car ma maladie est plus forte que moi. Car le mal a bien compris que mon mal était plus puissant que le sien. Car le mal a besoin de plus puissant que lui pour faire le mal. Car le mal est juste mais n’a aucune justification. Car la justification vient de ce qui n’est pas bon. Je ne vis pas dans l’ignorance que ma langue est bonne pour le mal. Car j’ai un mal plus puissant que le mal. Car je fais des mots malades qui augmentent ma maladie. Car j’ai décidé d’être encore plus malade que je suis malade. Car je vais mettre mes mains mauvaises dans ma bouche malade. Car elles sauront où trouver le mal que je vais vomir. Car je ne vis pas dans l’ignorance que j’ai une maladie plus malade que le corps. Car je vais cracher et mettre ce que je n’ignore pas être dans mon ventre dans un verre. Car ce verre de mon ventre je vais le confier à un mal plus puissant que mon mal et que le mal. Car je sais qu’il est plus puissant car il est le plus beau des Mal. Car seul est le Mal plus puissant que mon mal et que le mal à prendre pitié de ma longue misère. Car ma longue misère devient le poison de mon ventre que j’ai confié à la beauté seule. Car ma langue viciée et mes mains mauvaises ne vivent pas dans l’ignorance de la terreur. Car beauté et laideur partagent la même terreur faite à la langue. Car le poison confié à celui qui possède toutes les langues me sera rendu. Car je ne vis pas dans l’ignorance qu’il me faut boire et manger ma longue misère. Car mon corps malade a besoin de ma langue malade et ma longue misère. Car c’est ainsi que s’accomplit ma maladie que mes mains mauvaises dirigent. Car grand malheur au mal qui est venu dans ma tête pour diriger mes mots et mes pensées. Car le mal ignore que j’ai un mal plus puissant et que ce mal plus puissant gouverne mon corps. Car le mal que le mal a fait accroît ma maladie et ma langue viciée. Car ma langue viciée diminue les idées vertueuses et les mots vertueux que le mal me force à manger. Car grand malheur au mal qui s’ignore et se pense vertueux. Car grand malheur à lui qui porte le mal à plus malade que lui. Car son mal augmente ma maladie et le Mal plus puissant que mon mal et le mal approuve l’accroissement de ma maladie. Car ma maladie sert le Mal plus puissant que mon corps malade et que le mal que l’on me fait. Car mon corps malade produit une langue viciée et des mains mauvaises. Car le mal moins puissant que mon mal meurt de mon mal qui ruine et son mal et sa vertu. Car le mal moins puissant que ma langue se ronge de ma langue viciée et mauvaise. Car le mal moins puissant que mon mal force ma langue et ma tête pour pomper ma puissance car il manque de lui. Car il manque de lui mais il ignore qu’il meurt de ma maladie. Il meurt de ma maladie car il la suit à la trace et se projette en elle et suce ma moelle malade qui partage la même santé que celle des rats. Car mon mal ne peut soigner ce qui est bien fait dans le mal car ce mal ne partage pas celui des rats. Car mon mal est ma maladie est la langue viciée que suivent mes mains mauvaises. Car le mal moins puissant que mon mal a fait des mots une médecine de médecins et de prêtres. Je ne vis pas dans l’ignorance de sa médecine et de ses grands prêches auxquels je ne comprends rien. Car je vis dans la connaissance de la médecine malade des plus grands malades. Car les plus grands malades ont la plus grande santé. Car notre médecine ne nous sauve pas elle accroît notre malheur. Car l’accroissement de mon malheur me donne la connaissance du Mal plus puissant que le mal. Car la langue viciée et mauvaise me précède et me suit. Car de moi et de mon mal mortel je tire la langue mauvaise et viciée. Car mon mal préexiste au mal que l’on me fait. Car mes mots laissent entrer en eux le mal que l’on me fait car mes mots préexistent à cela. Car mes mots sortent de mon corps et de ma longue misère. Car tout le mal qui force ma tête ignore la logique de mon métabolisme malade. Car ce corps a le sang malade, les yeux aveugles et le buste torve. Car mon corps est infecté et infecte le mal moins puissant que le mal. Le mal devient bon pour mon mal plus puissant que le mal. Car ma langue viciée sait remuer mon grand malheur et l’accroître. Car le mal aura ma propre face sans autre revers et cela il l’ignore et cela se fait. Car le mal moins puissant que mon mal rampe à même ma langue malade sans en partager la maladie mauvaise. Car le mal que fait le mal est un mal bien fait. Car le mal que fait le mal est un mal bien fait qui rampe sous ma langue. Car plus le mal me fait le mal plus il jugule ma langue plus il me fait comme les rats. Plus je suis faite comme les rats plus je partage la langue du rat et sa prolifération. Car plus le mal me cerne plus il rampe sous ma langue et libère les rats. Car le mal est moins que mon mal et que le mal plus puissant. Car le mal moins puissant que ma langue malade a besoin de moi car il sait que j’ai la langue mauvaise qui est bonne pour lui. Car ce mal que l’on me fait montre bien que le mal est moins puissant que mon mal. Car si le mal était plus puissant que mon mal il n’aurait pas besoin de moi pour s’accomplir. Car le mal veut mon corps car il sait que ma langue mauvaise est bonne pour qu’il s’accomplisse. Car il le sait et en a besoin et pour ce faire entre dans mes mots. Car il en veut la possession et il veut régner dedans. Car il entre dans ma tête, se coince sous mes dents et avale ma langue. Car il veut diriger mes mots et les posséder pour posséder ce qui lui manque. Car il ignore que je suis possédée par un mal plus puissant que son mal et que de cela il périra. Car il ignore qu’en entrant dans ma tête il se condamne à mon mal. Car il ignore qu’en voulant me posséder il se condamne à ce qui m’affame. Car ce qui m’affame est un mal plus puissant que le mal qui est bon. Car le mal rassasié ne digère pas ma maladie. Car il s’inocule ma maladie sans en posséder la puissance de faim. Car il ignore qu’il diminue de ma maladie car la langue remue de son mal et neutralise son histoire. Car il ignore que son histoire faite pour me faire mal le découvre moins puissant que mon mal. Car mon mal plus puissant que son mal a remué la langue qui se dégonde. Car la langue qui se dégonde est injuste pour l’histoire du mal qui est juste et bonne. Car la langue qui se dégonde consolide les estomacs en inoculant des maladies rares. Car la langue qui se dégonde est sans fin et malade. Car le mal se vengera de ce qui est injuste pour lui. Car je ne vis pas sans ignorer que le mal qui est juste et bon veut se repaître de ma langue viciée et de mes mains mauvaises. Car je ne vis pas sans ignorer que dès lors je suis le maître d’un mal plus puissant que mon mal et que je sers pourtant. Car je ne vis pas sans ignorer que ma maladie me courbe vers la terre pour me soumettre aux puissances de celui qui possède toutes les langues et qui fait remuer ma langue. Car je n’ignore pas que plus ma langue viciée remue plus je partage la langue du rat. Car je n’ignore pas que je ne suis rien sans la langue viciée et mauvaise qui me possède et m’affame. Car je n’ignore pas que ce que je sers augmente ma longue misère et diminue mon corps infirme. Car cela accroît le plus beau des Mal. Car lui seul aime ma longue misère et ne souhaite pas y mettre fin.

Amandine André

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entre deux © Image Gaétane Laurent-DarbonCercle des chiens. Exercice III

par Amandine André

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image : claude cahunTraduction (soi-)disant : une expropriation d’intimités

par Nathanaël
Le texte que voici a été prononcé le 14 avril 2011, au Centre d’études poétiques, ÉNS-Lyon, lors d’une journée d’études transdisciplinaires organisée par Myriam Suchet. Nathanaël est l’auteure d’une vingtaine de livres, dont le triptyque de carnets, Carnet de désaccords, Carnet de délibérations et Carnet de somme. Ses traductions comprennent des ouvrages d’Édouard Glissant, de Danielle Collobert, de Catherine Mavrikakis, de Hilda Hilst, et d’Hervé Guibert. Elle vit à Chicago.