© Image Alice Lewis

21h12

Il est 21h12 et ai l’impression que quelque chose de la langue m’a traversée par la vitre. Que je suis passée dans la fiction. Que suis allée vers là où il est difficile de revenir. Ne sais plus alors comment je suis, si tu existes. Tu m’a peut-être oubliée dans tous ces mots.

Hier, tout s’est mal écrit. On écrit trop vite maintenant. Même les mots sont des accidentés de nos routes virtuelles. Cette vitesse est nouvelle pour moi. Tout ce dit vite et mal et vite et au plus proche de ce qui existe ou révulse.

Je pense que des personnes qui écrivent, ne devraient pas s’ écrire. Je pense que ceux qui veulent se toucher dans le silence des bêtes, ne devraient pas s’écrire. Je pense qu’écrire retourne la chair cru et je ne voulais pas être viande cuite.

Me comprends-tu seulement après cette crise. Hier, mon corps a failli céder sous tes mots. Pas de ta main. Me comprends-tu seulement quand je te dis « Tu ne devrais pas dire ça ». Je ne veux pas que tu recouvres mon visage de cette façon. Je veux que mon visage te parvienne dans sa brutalité. Je ne veux pas que mon visage mente. Je veux que mon corps te parvienne dans sa brutalité.

Aujourd’hui, j’ai beaucoup aimé travailler dans le parc. La nuit m’enferme et quand le jour vient, je me sens relâchée. Ça me fait du bien. C’est différent. Pas de long trajet le jour.

Hier, ce n’était pas de ta main. Je voulais juste te dire que ce n’était pas de ta main. J’aime aujourd’hui parce que tu ne m’a rien déposé dans la boîte.

Amandine André, 2009